Alors que les échéances approchent, c’est le moment de refaire un point sur l’obligation de l’individualisation des frais de chauffage. En effet, l’État vient de préciser les conditions de l’obligation par le décret du 22 mai 2019 et l’arrêté du 6 septembre 2019. Par ailleurs, une étude de l’ADEME vient d’être publiée et partage un premier retour d’expérience sur l’impact des répartiteurs de frais de chauffage en copropriétés.

Décryptages…

Quels équipements permettent de répartir les frais de chauffage ?

La répartition des frais de chauffage doit se faire à l’aide de compteurs de chaleur installés sur le départ de chauffage de chaque logement, lorsque cela est techniquement possible et que cela n’entraîne pas de coût excessif au regard des économies d’énergie. Dans une majorité des cas, l’installation de ces compteurs n’est pas possible au regard de la configuration du réseau. La solution de répartiteurs de frais de chauffage doit alors être envisagée en lieu et place.

Quels sont les exceptions à l’obligation d’individualisation des frais de chauffage ?

Il est prévu un certain nombre de cas pour lesquels l’obligation ne s’applique pas :
  • Immeubles dans lesquels, il est techniquement impossible d’installer des répartiteurs de frais de chauffage. Ces cas sont identifiés dans l’arrêté du 6 septembre 2019. Il s’agit des cas où la distribution de chauffage n’est pas assurée par une boucle indépendante pour chacun des lots :
    • l’émission de chaleur se fait par dalle chauffante sans mesure possible par local ;
    • l’installation de chauffage est équipée d’émetteurs de chaleur montés en série (monotubes en série) ;
    • l’installation de chauffage est constituée de systèmes de chauffage à air chaud non réversibles ;
    • l’installation de chauffage est équipée d’émetteurs fonctionnant à la vapeur ;
    • l’installation de chauffage est équipée de batteries ou de tubes à ailettes, de convecteurs à eau chaude, ou de ventilo-convecteurs dès lors que chaque local ne dispose pas de boucle individuelle de chauffage.
  • Immeubles dont les valeurs de consommation en chauffage sont inférieures à un seuil de 80 kwh/m2SHAB.an ;
  • Immeubles pour lesquels il aura été justifié que l’individualisation des frais de chauffage par l’installation de répartiteurs de frais de chauffage entraîne un coût excessif avec une absence de rentabilité sur 10 ans. Dans ce cas, le propriétaire de l’immeuble ou, le cas échéant, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic établit une note justifiant de cette impossibilité technique ou de ce coût excessif. Sénova, en tant que bureau d’études, peut réaliser ce calcul et établir la note.

Comment savoir si l’on est sous le seuil des 80 kwh/m²SAHB.an ?

Les copropriétés dont les consommations de chauffage sont inférieures à 80 kWh/m2Shab.an sont exemptées d’obligation d’individualisation des frais de chauffage. La consommation de chauffage d’une copropriété se  calcule à partir de la consommation de chaleur moyenne relevée sur les 3 dernières années, divisée par la surface habitable définie à l’article R. * 111-2 du code de la construction et de l’habitation. Les consommations d’eau chaude sanitaire doivent être déduites des consommations de chaleur. Le décret du 6 septembre 2019 ne précise malheureusement pas le mode de calcul des consommations d’eau chaude sanitaire, ce qui peut occasionner une incertitude pour les copropriétés fleurtant avec le seuil des 80 kWh/m2.an. Sénova peut également vous assister dans ce calcul.

Comment justifier l’absence de rentabilité ?

Le décret du 6 septembre 2019 propose dans son annexe 2 une note de calcul permettant la justification de rentabilité.

CGA (€) = I + A*9-B*10

  • CGA = Coût global actualisé sur 10 ans. Si le CGA est négatif alors l’installation est rentable en moins de 10 ans. Si le CGA est strictement supérieur à 0, alors il y a absence de rentabilité et dispose d’une exemption d’individualiser les frais de chauffage.
  • I = Investissements en €TTC nécessaires à l’installation du système de répartition de frais de chauffage. Ces investissements sont établis sur la base de devis, et incluent les frais de fourniture et pose des compteurs/répartiteurs, les frais de fourniture et pose des robinets thermostatiques. Sont en revanche exclus les autres coûts associés : désembouage, équilibrage, remplacement de robinets thermostatiques si ceux-ci étaient déjà présents, filtre à boue et autres frais associés aux travaux sur le réseaux de chauffage.
  • A = Coût annuels en €TTC liés à la location, à l’entretien et à la relève des compteurs/répartiteurs.
  • B = Gains en €TTC liés à la mise en place de l’individualisation des frais de chauffage. Ce gain est établi sur la base d‘une hypothèse fixée de 15 % d’économie d’énergie par rapport à la moyenne de consommation des 3 dernières années.

L’article ne précise aucune hypothèse d’inflation sur la maintenance/relève des répartiteurs ou d’évolution du prix de l’énergie. A défaut ces valeurs sont donc considérées comme constantes.

Quelles économies d’énergie réelle puis-je attendre d’une répartition des frais de chauffage ?

La récente étude de l’ADEME, met en lumière les économies d’énergie liées aux répartiteurs de frais de chauffage.

Cette étude portant sur plus de 4000 logements répartis sur 132 copropriétés, mets en avant une évolution des consommations d’énergie avant/après l’individualisation de frais de chauffage en moyenne de 15 %. Ces résultats ont été confrontés avec d’autres études européennes qui aboutissent sensiblement aux même résultats.

Il convient toutefois d’être prudent dans l’analyse de ces résultats :

  • Les gains énergétiques imputables aux seuls répartiteurs n’ont pas pu être évalué. La pose de répartiteurs s’accompagne quasi systématiquement par la mise en œuvre généralisée de robinets thermostatiques. Les économies annoncées par l’ADEME comprennent donc également les gains imputables aux robinets thermostatiques. Par ailleurs bien que ce ne soit pas précisé dans l’étude, il est probable que ces gains comprennent également ceux liés à des opérations de désembouage.
  • On relève une dispersion importante des résultats autour de cette moyenne de 15 % d’économies d’énergie. Certaines copropriétés vont obtenir des résultats bien meilleurs et d’autres n’ont obtenu aucun gain suite à la mise en œuvre des répartiteurs. Cette dispersion est particulièrement marquée pour les copropriétés avec de faibles consommations (petite taille ou immeubles bien isolés).

Les 15 % d’économies d’énergie imputables aux répartiteurs restent donc à prendre avec précaution, l’atteinte de cet objectif étant conditionnée par :

  • La mise en place de robinets thermostatiques
  • Une installation de chauffage équilibrée et désembouée
  • La nécessité d’un suivi de consommation rigoureux et d’un accompagnement technique et humain des copropriétaires pour mettre en place les répartiteurs et suivre les résultats.

En règle générale à partir de quand peut on penser qu’il n’est plus rentable d’installer des répartiteurs de frais de chauffage ?

L’étude de l’ADEME révèle sur la base de simulations de quelques cas types que pour des consommations inférieures à 80-100 kWh/m2SHAB.an, la rentabilité de la répartition de frais de chauffage devient quasiment impossible. Ce niveau de consommation correspond à celui observé pour des copropriétés ayant mis en œuvre un programme de rénovation globale et performante (isolations de toutes les parois opaques, système de chauffage récent, ventilation performante).

Donc si vous avez réalisé une rénovation énergétique de votre immeuble, ou que vous projetez d’en réaliser une prochainement, demandez à votre maître d’œuvre de vérifier si cela vous exempte de cette obligation.

A quelle échéance faudra-t-il mettre en œuvre l’individualisation des frais de chauffage ?

La date de mise en service des appareils doit avoir lieu au plus tard le 25 octobre 2020.

Comment la décision de mise en œuvre doit-elle être adoptée ?

Ces travaux sont votés en assemblée générale des copropriétaires à la majorité absolue.
Pour ce faire, le syndic de copropriété doit au préalable mettre à l’ordre du jour de l’assemblée générale la question des devis et des travaux d’individualisation des frais de chauffage ou de refroidissement.

Les bons réflexes à adopter

1 – Se faire accompagner sur le sujet de l’individualisation des frais de chauffage

Sénova propose aux syndics et conseils syndicaux son assistance pour étudier la mise en place de l’individualisation de frais de chauffage :

  • Étude de faisabilité technique ;
  • Étude de rentabilité ;
  • Consultation de prestataires ;
  • Suivi de travaux ;
  • Accompagnement, communication, informations des copropriétaires ;
  • Suivi de consommation énergétique avant et après travaux.

2 – Penser « rénovation » avant de penser « individualisation »

Si votre copropriété n’est pas isolée ou n’a pas fait l’objet d’une rénovation récente, c’est certainement l’occasion de réfléchir à la possibilité de réaliser des travaux de rénovation globale et performante. De plus en plus de copropriétés se sont lancées dans ces démarches : pourquoi pas vous ?

La première étape consiste alors à réaliser un audit global de votre résidence dans lequel nous incluront la question de l’individualisation des frais de chauffage, mais également toutes les autres possibilités d’amélioration de votre résidence.

Sources :